La philosophie comme dialogue avec l'ami est alors remplacée par l'anthropologie comme détour par l'ennemi pour accéder aux plis originaires de la pensée.
http://www.cairn.info/article_p.php?ID_ARTICLE=CRITI_774_0909
Viveiros pose clairement ce problème dans un chapitre intitulé « Chamanisme transversal ». Il propose une « dissolution constructive » du sacrifice décrivant « le champ de virtualités dynamiques dont le sacrifice est une actualisation singulière » (MC, p. 119). L'analyse du chamanisme fournit un tel champ de virtualités, pour autant que le chamane est décrit classiquement comme celui qui peut franchir en vision les barrières entre espèces, et se voir à la fois comme sacrificateur et comme victime25. Ce chamanisme « horizontal » ou interspécifique est opposé au chamanisme « vertical » passant entre les hommes et les dieux26. Le problème posé par Viveiros est alors celui-ci : comment le chamanisme horizontal peut-il se maintenir sans passer à la verticale ? Reprenant des analyses de Pierre Clastres, Viveiros parle d'une transformation prophétique du chamanisme amazonien en réaction à sa transformation sacerdotale. Pour éviter de fonder une Église et un État, le chamane lance une prophétie sur un avenir catastrophique, du type : « les hommes seront des animaux à la fin des temps. » Il parvient ainsi à construire un « plan d'immanence » en multipliant les « lignes de fuite ». « L'humanité reste immanente, en réabsorbant la plus grande partie des foyers de transcendance qui s'allument sans cesse dans la vaste forêt touffue, diverse et foisonnante qu'est le socius amazonien. Le chamane horizontal amazonien marque, par son omniprésence dans la région, l'impossibilité de coïncidence entre le pouvoir politique et la puissance cosmique, rendant ainsi plus difficile l'élaboration d'un système sacrificiel de type classique » (MC, p. 127).
No comments:
Post a Comment